Famille Vanier

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Procès entre Guillaume Vanier et François Quintal en juillet 1679

English translation coming soon.

Dans un livre consacré aux Crimes et châtiments au Canada français, l’auteur Raymond Boyer résume l'histoire et le procès de juillet 1679 entre Guillaume Vanier et François Quintal:

"En 1679 à Montréal, il était possible pour un prisonnier, détenu en attendant son procès, de déguster son vin tout en causant avec un policier, un geôlier et sa femme qui vendait la consommation.

François Quintal [...] s'était absenté une fois de sa paroisse pendant une dizaine de jours sans permis, au mépris des édits royaux. Soupconné d'avoir été faire la traite avec les Indiens, Quintal fut arrêté et amené a Montréal. En attendant son procès (le 14 juillet 1679), il buvait un jour en compagnie de greôlier, Denis Marceau, de sa femme Madeleine Roy, d'un nomme Lavigne et d'un des archers qui l'avait arrêté, Guillaume Vanier dit Lafontaine. La discussion s'envenima et, d'un couteau que le geôlier lui avait prêté pour couper une pipée de tabac, Quintal blessa le policier Vanier au bras gauche.

Marlgré sa position dévaforable, losrque Quintal passa devant le juge Migeon de Bransat, il ne fut condamné qu'à 20 écus d'amende et à 45 livres de réparation envers sa victime."(33)


Jean Quintal a fait une recherche plus approfondie sur cette histoire et il a obtenu et transcrit les documents qui suivent des Archives nationales du Québec à Montréal:

  • Examen du chirurgien fait à Guillaume Vanier, le soir même de sa blessure (document transcrit) (14 juillet 1679) (document original à venir)
  • Témoignage de Guillaume Vanier, le même soir (document transcrit) (14 juillet 1679) (document original à venir)
  • Interrogatoire de François Quintal, le lendemain (document transcrit) (15 juillet 1679) (document original à venir)

    D'après Jean Quintal: "Il est à remarquer que, à cette époque, il était important que les gens soient sur leurs terres pour les défricher et/ou voir à leurs affaires. C'est pourquoi ce procès n'a duré que 6 jours. Sans compter que la prison n'avait pas encore été construite!"

    Grâce aux documents ci-haut, Jean Quintal a écrit l'histoire suivante à propos de ce procès (ce texte a été a publié dans le Bulletin de la société généalogique de Drummondville (La Lanterne)):


    Un procès au criminel en 1679 à Montréal

    Le 14 juillet 1679, moins d’un an après son mariage, mon ancêtre François Quintal est retenu prisonnier dans les prisons du baillage de l’Île de Montréal depuis une semaine. À l’époque, ces prisons ne consistent que d’une chambre destinée pour lad prison localisée en la maison ou est a present la prison de ce baillage, attendu que celle que lon fait construire n’est pas parachevée.

    Une ordonnance de monseigneur l’Intendant de Nouvelle-France, en date du 6 juin dernier, l’accuse d’avoir contrevenu aux ordres du Roy, ayant esté dans les bois pour y traiter avec les sauvages contre les deffenses de sa Magesté. Pour sa défense, François allèguera qu’il est sorty des habitations et esté hors, environ, absent pendant neuf ou dix jours, cherchant quelque beste a tuër pour sa subsistance et celle de sa famille […] et que mesme du jour quil a esté pris, il devoit venir en cette isle pour vaquer a ses affaires a cause de la venüe des sauvages et quil ne craignoit rien nayant pas esté longtemps absent de sa maison.

    Il avait été pris et arresté dans sa maison de Boucherville ou il est habitant sur les quatre heures du matin […] par Monsieur de Comporté, prévôt de la maréchaussée, aidé de l’un de ses archers.

    Le soir après dîner, Quintal reçoit la visite de celui qui a aidé à sa prise et capture, Guillaume Vanier dit Lafontaine, archer de la compagnie de Monsieur le prevost de Nos Seigneurs les mareschaux de France en ce pays. Le geôlier, Denis Marsaud (Marceau) raconte que, après plusieurs propos qu’ils eurent ensemble dans leur entretien en sa présence, ledit Lafontaine envoya chercher un pot de vin qu’ils beurent de compagnie, et encore un second pendant lequel temps il survint le nommé Lavigne, habitant qui but aussy avec eux, lequel en paya un autre. Sans quil paroit entre Lafontaine et Quintal aucun demeslé, le geôlier, voyant que lesd partyes s’entretenoient seulement de choses indifferentes et voulant sommeiller, se retira de leur compagnie et s’assit sur un coffre appuyé sur le lit dans lad chambre ou il s’endormit.

    L’épouse du geôlier, Magdelaine Roy, continue le récit. Au quatrième pot de vin payé par Vanier dit Lafontaine après le départ de Lavigne, Lafontaine et Quintal en viennent à parler de son arrestation et Lafontaine se vante de l’avoir capturé. Quintal nie et affirme que c’estoit un brave homme qui l’avoit saisy nommant Monsieur de Comporté et que c’estoit un sot de sen vouloir vanter, sur quoy repliqua ledit Lafontaine que c’estoit luy qui en estoit l’autre et reciproquement ils ont l’un envers l’autre des paroles aygres et facheuses et quelques iniures. Sur ce, Quintal se leva qui vint donner un soufflet à Lafontaine, lesquels se prirent aussitot aux mains. Ledit Lafontaine ayant saisi Quintal aux cheveux ce qui luy causoit de la douleur luy faisant baisser la teste presque jusques en terre, qui avoit peutestre obligé Quintal, la chaleur du vin ou le demon le poussant, de luy donner un coup de couteau au haut du bras gauche.

    Craignant quil n’arrivat accident ou malheur et affin dempescher quil n’arrivat un plus grand desordre, l’épouse du geôlier, Magdelaine Roy, alla eveiller son mary: Mansau leve toy voila un homme qui est blessé…en se disant in petto voila un homme mort en voyant une grande quantité de sang sortir de la blessure. Le geôlier sentit sa femme qui le poussoit, et les ayant separés vit que ledit Lafontaine estoit blessé, et perdoit une grande quantité de sang. Il se saisit dud Quintal et crioit au secours, et aprit par led blessé que led Quintal luy avoit donné un coup du mesme cousteau dont il luy avoit fait present pour couper une pipe de tabac.

    Elizabeth Martin, femme de Jean Ozon h(abit)ant et scieur de long, sur les neuf ou dix heures du soir, estant couchée audessus de la chambre destinée pour lad prison de ce baillage, entendit la femme du geollier qui l’appellait. Elle descendit aussytot et estant entrée vit ledit Lafontaine tout en sang… […] et fut advertir led Sieur de Comporté de se rendre en lad maison. Rendu sur les lieux, le Sieur de Comporté constate la situation, fouille Quintal pour rechercher le couteau introuvable et donne l’ordre à son huissier, le Sieur René Hubert, de mander Jean Baptiste Migeon de Branssat Licensié en Loix Baillit Juge civil et criminel de L’Isle de Montreal pour instruire un procès extraordinaire sur la plainte et req(ue)te de Guillaume Vanier dit Lafontaine. Ce qui est fait sur le champ.

    Durant ce même temps, Vanier dit Lafontaine, le blessé, a fait appeler, Anthoine Forestier maistre chirurgien de Montreal pour le voir panser et medicamenter. Ce chirurgien lui trouve premi(ereme)nt un coup sur la partye moyenne de lomoplate du costé gauche tirant proche du costé de lhumerus partye externe , playe de profondeur de deux pouces et de large dun pouce ou environ tant l’humeur ou enfleure qui sest ependué dune partye de lhumerus et de lomoplate. Ce quy luy cause grand doleur que larticulation par son mouvement. Ce qui ne peust estre autrement a cause de la fluxion qui est deja en ladicte partye, Jugeant que telle playe a estée faicte par instrument tranchant pointus comme sont couteaux et autre de telle nature, mettant neanmoingns ladicte playe au nombre des guerissables… ne pouvant limiter le temps de la guerison de lad playe a cause de la grande fluxion. En conséquence, il le panse et médicamente avant d’écrire son examen le quatorsiesme Jour de Juillet mille six cens soixante dix neuf passés les neuf et dix heures du soir ou environ.

    Toujours le même soir, le bailli-juge recueille le témoignage du blessé, Guillaume Vanier dit Lafontaine, archer de la maréchaussée de ce pays, demandeur et complaignant. Après quoi, il ordonne aud geollier de mettre les fers aux pieds [de l’accusé François Quintal] crainte quil n’evade desd prisons.

    Le lendemain, 15 juillet 1679, le bailli-juge, instruisant un procez criminel extraordinaire, interroge l’accusé Quintal qui se souvient en détails de la visite de l’archer Vanier dit Lafontaine, mais n’ayant point de souvenance du coup de couteau qu’il lui a donné. Il l’avait apprit le matin même de la bouche de l’épouse du geôlier. Il advoüe quil avoit bu par excez. Puis le bailli-juge continue son procès en prenant la déposition du geôlier, Denis Marsaud âgé de 40 ans, de sa femme, Magdelaine Roy âgée de 38 ans, et de la voisine d’en haut, Élizabeth Martin âgée de 29 ans.

    Le 16, Francois Charron Sieur de La Barre, marchand et present en cette ville, disant que le nommé francois Quintal est son parent, adresse une supplique quil plaise ordonner que ledit quintal sera delivré des fers quil a aux pieds. Il invoque pour raisons que lad playe ne peut avoir de suittes dangereuses et que ledit blessé est entieremenet hors de risque et mesme sur le point d’accommodement avec ledit quintal et, ne s’agissant a present que de dommages et interetz, que led quintal a plus que suffisamment du bien [pour] satisfaire, situez en la seigneurie de boucherville. De plus, le Sieur de La Barre respond [de Quintal] quil ne sen ira point desd prisons. Migeon de Branssat demande que la supplique soit communiquée au substitut [du procureur fiscal] pour requerir ce quil advisera.

    Le 17 juillet, le substitut J. Petit, donne réponse sous condition : Je consans que led quintal prisonnier soit liberé de ces fairs en donnant bonne et suffisant causion de la fuite de sa personne.Le bailli-juge ordonne à Denis Marsau conscierge des prisons de ceans de liberer led Quintal des fers qui luy ont esté mis pour seureté de sa personne, apres que led S(ieur) Labarre aura promis au greffe de repondre dud Quintal son Parent en faisant les soumissions prescrites de droit. Ce qui est fait sur le champ par François Charron.

    Le prisonnier François Quintal peut enfin être débarrassé de ses fers qu’il a aux pieds depuis 2 jours. Durant le même temps, Jean Baptiste Migeon de Branssat s’occupe de l’assignation et du récolement des témoins Denis Marsaud et MagdelaineRoy. Après lecture, tous deux disent que leur déposition respective contient verité. Ces récolements ainsi faits, suit alors la confrontation entre le geôlier, sa femme et l’accusé Quintal. Après avoir entendu la déposition récolée du geôlier Denis Marsaud, François Quintal affirme quil na aucun reproche a proposer et quil le tient pour honneste homme. Quant à la déposition récolée de l’épouse du geôlier, Magdelaine Roy, Quintal la reconnoit pour femme de bien et dhonneur, et ajoute que lad tesmoin l’avoit oublié de dire que led Lafontaine l’avoit appelle sot ce qui avoit causé la querelle et quil lavoit pris aux cheveux; par lad tesmoin a esté repliqué quelle n’en avoit aucune souvenance.

    Le 18e Jour de Juillet 1679, une fois le procès communiqué au substitut du pro(cureu)r fiscal de lisle de Montreal… attendu que par les piesses dud procet il paroit que le coup dont a esté frappé led Complaignant a esté donné dans l’yvresse, pour reparation de quoy led substitut conclud pour l’interez des Seigneurs [les maréchaux] a ce que led accusé soit condamné en cent livres damande envers lesd Seigneurs en la somme de cent cinquante livres pour les dommages et interez dud complaignant et les depens du procet.

    Le même jour et an, le bailli-juge prononce sa sentence. Pour ceux qui ces lettres verront Salut Nous Jean Baptiste Migeon de Branssat Licensié en Loix Baillit Juge civil et criminel de L’Isle de Montreal… aattendu qu’ il appert suffisamment que led Quintal est dument atteint et connaissant d’avoir estant eschauffé de vin donné malicieusement un coup de cousteau dans le bras gauche aud Lafontaine demandeur et Complaignant, pour reparation de quoy avons condamné et condamnons ledit Quintal en vingt escus d’amendes et en cent quarante cinq livres de reparation et interests civiles sur laquelle sera prise la s(omm)e de vingt Livres qui seront payez aux archers qui l’ont gardé endites prisons, aux depens du proces qui seront par Nous taxez, non compris ceux qu’yl convient de donner aud chirurgien pour l’avoir medicamenter. Lesquelles sommes seront acquittées avant que led accusé soit eslargi, auquel nous faisons expresses inhibitions et deffenses de plus recidiver soubz plus grande peine et Chatiment corporel.

    Il faut croire que les charges d’avoir contrevenu aux ordres du Roi ne sont pas retenues car François Quintal sera libéré après acquiescement des décisions du bailli-juge. Ce n’est que 2 jours plus tard, soit le 20 juillet 1679 que le jugement sera acquiescé par l’accusé Quintal, par J. Petit substitut du procureur fiscal, et par le Sieur Hubert procureur de Lafontaine.

    François Quintal est libéré sur le champ, l’ayant échappé belle. Car il a bénéficié de la clémence de la cour. En effet, selon E.-Z. Massicotte dans les Bulletins des Recherches Historiques (1916, 1924), le règlement IX de la maréchaussée est explicite : Ceux qui donneront un coup dans la chaleur des démêles, si le coup est précédé d’un démenti, celui qui aura frappé tiendra prison pendant un an, et s’il n’a point été précédé d’un démenti, tiendra prison pendant deux ans. Et après qu’il sera sorti de prison, il se mettra encore en état de recevoir de la main de l’offensé des coups pareils à ceux qu’il aura donnés et lui demandera pardon. Quintal s’est sauvé d’un an de prison, d’un soufflet, d’un coup de couteau dans le haut du bras gauche et d’une demande de pardon… Ouf !

    François retourne rapidement auprès de sa Marie qui commençait à s’ennuyer, seule à la maison. Et leur vie de couple peut reprendre son cours avec défrichage, bûchage, jardinage, semences et récoltes... comme principaux passe-temps.

    Mais pas pour trop longtemps à la fois car 10 jours après sa sortie de prison, François Quintal en tant que tailleur d’habits, est déjà à Québec où, par-devant le notaire royal Gilles Rageot, le cordonnier Jean Guitard reconnaît et confesse lui devoir la somme de 25 livres tournois pour des marchandises livrées. Ce dernier promet et s’oblige de lui payer cette somme à la St-Michel [29 septembre]. Ce qui sous-entend un autre voyage d’affaires de Boucherville à Québec, aller-retour en canot d’escorces.

    33. Boyer, R. (1966), Les crimes et les châtiments au Canada français du XVIIe au XXe siècle, Montréal, Le Cercle du Livre de France.


    Légende:
    Représentation des dates: année-mois-jour
    ?    Information manquante
    ...   Données personnelles connues mais non dévoilées pour respecter les droits à la vie privée pour les personnes encore en vie. Incluant dates de naissances et certains noms de famille puisque ceci dévoilerait les noms de famille des deux parents d'une personne encore en vie qui se retrouve dans l'arbre généalogique. C'est une pratique qui vise à éviter le vol d'identité.

    Legend:
    Format of dates: year-month-day
    ?    Missing Information
    ...   Known information but not divulged to respect the privacy of living people listed on the family tree. This includes birth dates and some family names since it would reveal the family name of two parents of a living person. This is to avoid the risk of identity theft.


    Dernières modifications / Last updated 2011-12-09. Jean-Yves Vanier

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